Hier (mardi 2 juillet), Delphine Batho a été démise de ses fonctions de ministre de l’écologie et du développement durable. Philippe Martin prend la relève. Explications.
Suite à la critique ouverte de Delphine Batho sur son budget 2014, le gouvernement n’a pas attendu longtemps pour agir. Elle l’avait notamment qualifié de “mauvais” dû à la baisse de 7% des crédits du ministère de l’écologie. La ministre a estimé qu'il fallait désormais se poser la question de savoir si l'écologie est "bien une priorité ?". "Est-ce qu'on a la capacité de passer du discours aux actes ?" a-t-elle défié au gouvernement. En conséquence, le gouvernement l’a “remerciée” hier, pour engager Philippe Martin, député PS et président du conseil général du Gers.
C’est donc le troisième ministre de l’écologie et du développement durable en un peu plus d’un an, suite aux licenciements de Nicole Bricq lors du mini-remaniement en juin 2012, et celui d’hier. Le gouvernement espère un nouveau souffle dans sa quête de “social-écologie” ainsi que de “l’éco-développement”, pour enfin prendre les choses en main. Ce combatif est encore méconnu du grand public, mais considéré comme un bon connaisseur des questions d’environnement. Il s’est notamment battu contre les tests OGM en plein champ, contre la Commission Européenne pour son autorisation d’importation de maïs transgénique pour la consommation, en déposant un recours auprès de la Cour de Justice. Il a fait de la résistance contre la Californie, qui a rendu illégal le foie gras : il a répondu par un boycott des vins californiens.
Bilan de Delphine Batho
Elle dira tout sur son “limogeage” jeudi, après la passation de pouvoir avec M. Martin, mais nul besoin de préciser que celui-ci n’est pas exclusivement lié à sa critique contre le budget. Cette quadra, principalement formée par ses expériences à la Fédération Indépendante et Démocratique Lycéenne et sa vice-présidence chez SOS-Racisme, n’avait pas que des amis dans le gouvernement - loin de là. Après un passage délicat au ministère de la justice et ses différends avec Christiane Taubira, elle a continué sur la même lancée au ministère de l’écologie et du développement durable, où trois conseillers en communication et un directeur de cabinet ont été remplacés en à peine un an. “Delphine n’est pas dans la séduction” analyse le député socialiste de l'Essonne Malek Boutih, l'un de ses plus proches amis.
Lire l'article "#Delphine #Batho : Analyse d’un phénomène twittoresque typique"
Ayant toujours vécu dans l’opposition, elle n’aime pas les compromis. Considérée trop discrète à l’extérieur, c’est l’inverse à l’intérieur - elle n’est pas assez ambitieuse sur les enjeux environnementaux. En tandem entre le gaz de schiste, la fiscalité, le nucléaire et l’écologie, elle est partout et nulle-part à la fois, trop imprécise, pas assez convaincante. Elle ne pèse pas assez pour l’écologie, envers un duo François Hollande - Jean-Marc Ayrault trop peu engagés personnellement dans ces questions.
Lire les réactions des politiques français.
L'avis de Solorea
Pour l'instant, nous n’avons fait que restituer les avis de son entourage, mais voici nos tops et flops
Les Tops
Les tarifs d’achat :
Il faut le souligner, beaucoup de progrès ont été faits en ce qui concerne les subventions publiques en faveur du photovoltaïque. Le tarif d’achat a non-seulement été stabilisé, ce qui augmente la visibilité des investisseur et donc l’attraction du placement photovoltaïque.
Aller sur notre plateforme d'information sur le tarif d'achat photovoltaïque.
La bonification :
Elle a de plus mis en place la bonification des tarifs d’achat. Ceci va stimuler la consommation de panneaux solaires “made in Europe”, essentiels pour la relance de l’industrie européenne et de la confiance en les panneaux solaires - c’est une protection légitime face au dumping chinois, unanimement considéré déloyal.
En savoir plus sur la bonification.
Le débat national sur la transition énergétique :
Delphine Batho a fait parler de l’écologie, notamment à travers le Débat National sur la Transition Energétique (DNTE), organisé à travers la France. Une manière intelligente de faire parler les gens et non les politiciens. Une démocratie participative. Une décentralisation du débât, nécessaire pour stimuler les esprits en faveur d’une décentralisation de l’énergie et des responsabilités.
Lire nos conclusions sur le DNTE.
Les Flops
La ministre de l'opposition :
Delphine Batho a trop souvent été la ministre de l’opposition que la ministre du développement durable. Sans compromis, en toute controverse et dans la prise de position trop ferme, on risque de dissuader ceux qui a priori étaient susceptibles de suivre le mouvement écologique. Il faut commencer à faire du parti vert le parti d’un développement durable en cohésion avec ce qui est déjà mis en place, adapter nos technologies et notre savoir et les inscrire dans un cadre écologique. Faire ressortir l’éco-pragmatisme en nous tous, plutôt que de pérenniser une stigmatisation des écolos.
Des paroles plus que des actes :
Dans l’écologie, il faut agir, et pas s’éterniser sur les débats, les oppositions, le braquage. Un ministre de l’écologie trop dans les paroles, hyperactif et sur tous les fronts mais trop dispersé, empêche les prises de décisions pertinentes. Or, sans compromis, aucune action n’est démarrée car tous se braquent. La transition, par définition, est une voie de développement douce mais croissante. Ce n’est pas une rupture brutale. Or Delphine Batho, dans ses gestes et paroles, était considérée justement trop brutale, trop exigeante, dissuadant de l’écologie, et ainsi empêchant les choses de changer.
Espérons que Philippe Martin tirera les bonnes conclusions du limogeage de son prédécesseur, et qu’il ne répètera pas les erreurs qui sont reprochées à Delphine.
